Manuel pour les étudiants de la Ve année Dossier 5.

Навчальний посібник з аналітичного читання для студентів п’ятого курсу французького відділення / Укл. Г.Ф.Драненко, М.М.Попович. – Чернівці: Рута, 2006. –  108 с.

DOSSIER 5. Albert Camus (1913-1960)
Introduction
1. La biographie de l’écrivain : l’homme et ses racines
Le père d'Albert Camus travaillait dans un domaine viticole, près de Mondovi, pour un négociant de vins d'Alger. C'est dans ce département de Constantine que l'écrivain voit le jour en novembre 1913. Un an plus tard, Lucien Camus meurt à la bataille de la Marne et la famille s'installe à Alger. Albert y fait ses études, encouragé par ses professeurs dont Jean Grenier. Il commence à écrire très jeune et ses premiers textes paraissent dans la revue Sud (1932). Après le bac, il obtient un diplôme d'études supérieures en Lettres, section philosophie, mais la tuberculose l'empêche de passer l'agrégation. En 1935, il commence à écrire L'Envers et l'Endroit qui sera publié deux ans plus tard. A Alger, il fonde le Théâtre du Travail qu'il remplace en 1937 par le Théâtre de l'Équipe: entretemps, il a quitté le parti communiste auquel il adhérait. Il entre au journal du Front Populaire, créé par Pascal Pia: son enquête "Misère de la Kabylie" aura une action retentissante. En 1940, le Gouvernement Général de l'Algérie interdit le journal et s'arrange pour que Camus ne trouve plus de travail. Il s'installe à Paris et travaille comme secrétaire de rédaction à Paris-Soir. En 1943, il est lecteur chez Gallimard et prend la direction de Combat quand P. Pia est appelé à d'autres fonctions dans la Résistance.
La rupture avec Sartre a lieu en 1952, après la publication dans Les Temps Modernes de l'article de Jeanson qui reproche à la révolte de Camus d'être "délibérément statique". En 1956, à Alger, il lance son "Appel pour la trêve civile", alors que dehors, on hurle des menaces de mort. Il obtient le prix Nobel de littérature en 1957.
Le 4 janvier 1960, au Petit-Villeblevin, Camus trouve la mort en voiture. Il est enterré à Lourmarin où il avait acheté une maison.
En marge des courants philosophiques, Camus a poursuivi une réflexion sur la condition humaine. Refusant de formuler un acte de foi en Dieu, en l'histoire ou en la raison, il s'est opposé simultanément au christianisme, au marxisme et à l'existentialisme. Il n'a cessé de lutter contre toutes les idéologies et les abstractions qui détournent de l'humain. "Je me révolte, donc nous sommes...": à l'expérience individuelle de Caligula succède la solidarité du Dr Rieux dans une lutte interminable contre le Mal:
"Car il savait ce que cette foule en joie ignorait, et qu'on peut lire dans les livres, que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais, qu'il peut rester pendant des dizaines d'années endormi dans les meubles et le linge, qu'il attend patiemment dans les chambres, les caves, les malles, les mouchoirs et les paperasses, et que, peut-être, le jour viendrait où, pour le malheur et l'enseignement des hommes, la peste réveillerait ses rats et les enverrait mourir dans une cité heureuse." (La Peste)

2. Le contexte littéraire de l’œuvre  de A. Camus

Albert Camus fut d’abord un compagnon, puis un opposant de Jean-Paul Sartre. À la différence de Sartre, homme du nord, de la ville et de la société bourgeoise, Camus est un homme de la banlieue pauvre, de la Méditerranée, de la nature et de la mer: le soleil, la lumière, la mer, mais aussi la joie de vivre, le sentiment de la plénitude corporelle forment la tonalité fondamentale de son écriture et les thèmes récurrents. Camus se sent le représentant de la pensée méditerranéenne, autrement dit de la clarté (grecque, latine, classique). La clarté entre pour beaucoup dans sa conception de l’absurde et de l’homme absurde qui est avant tout celui qui reste lucide face à la vie. Cette attitude “hellène” ou “helléniste” est d’autant plus marquée que malgré son contact avec la culture arabe ou espagnole, Camus ne s’est jamais laissé influencer par l’islam qui lui reste fermé.
           L’existentialisme de Camus sera un existentialisme désespéré, mais aussi dépourvu de la nausée et du dégoût sartriens. C’est un désespoir clairvoyant, instaurateur de la grandeur de l’homme et de l’humanisme camusien.
          
3. L’œuvre et la pensée, l’absurde

L’homme absurde est au centre de la réflexion de Camus. Comme chez les autres philosophes existentialistes, le sentiment de l’absurde est la conséquence du caractère infondé de l’existence de l’homme - être limité face à l’absolu, étranger jeté dans un monde indifférent. Mais, comme Camus le montre, l’absurde ne réside ni dans l’homme, ni dans l’univers: il est le résultat de leur rapport antinomique et de la conscience que l’homme en a. Plusieurs attitudes sont alors possibles. Camus refuse celles qui sont des attitudes d’évasion: le suicide, qui consiste à escamoter, en le supprimant, l’un des termes de la contradiction (la suppression de la conscience). Il récuse aussi les doctrines situant hors de ce monde les raisons et les espérances qui donneraient un sens à la vie: croyances religieuse, suicide philosophique de la pensée (Kierkegaard, Jaspers, Chestov).
L’homme absurde est celui qui accepte lucidement le défi, c’est là le fondement de sa révolte qui le mène à assumer aussi bien sa liberté, mais aussi ses propres contradictions en décidant de vivre avec passion et seulement avec ce qu’il sait.
"L'absurde naît de cette confrontation entre l'appel humain et le silence déraisonnable du monde." (Le Mythe de Sisyphe, 1942). Dans cette phrase est concentrée la puissance d’un conflit, d’une confrontation qui supporte et emporte l’œuvre de Camus. Deux forces qui s’opposent : l’appel humain à connaître sa raison d’être et l’absence de réponse du milieu où il se trouve. L’homme vivant dans un monde dont il ne comprend pas le sens, dont il ignore tout, jusqu’à sa raison d’être .
L’appel humain, c’est la quête d’une cohérence, or pour Camus il n’y a pas de réponse à cette demande de sens. Tout au moins n’y a-t-il pas de réponse satisfaisante, car la seule qui pourrait satisfaire l’écrivain devrait avoir une dimension humaine : « Je ne puis comprendre qu’en termes humains. » (Le mythe de Sisyphe, 1942). Ainsi les religions qui définissent nos origines, qui créent du sens, qui posent un cadre, n’offrent pas de réponse pour l’homme absurde : « Je ne sais pas si ce monde à un sens qui le dépasse. Mais je sais que je ne connais pas ce sens et qu’il m’est impossible pour le moment de le connaître. Que signifie pour moi signification hors de ma condition ? » (Le mythe de Sisyphe, 1942). L'homme absurde n'accepte pas de perspectives divines. Il veut des réponses humaines.
L’absurde n’est pas un savoir, c’est un état acquis par la confrontation consciente de deux forces. Maintenir cet état demande une lucidité et nécessite un travail, l’absurde c’est la conscience toujours maintenue d’une « fracture entre le monde et mon esprit » écrit Camus dans le mythe de Sisyphe. Ainsi l’homme absurde doit s’obstiner à ne pas écouter les prophètes, à ne pas avoir assez d’imagination pour se représenter l’enfer, à ne faire intervenir que ce qui est certain, et si rien ne l’est, « …ceci du moins est une certitude. » (Le mythe de Sisyphe, 1942).
L’homme absurde ne pourrait s’échapper de son état qu’en niant l’une des forces contradictoires qui le fait naître : trouver un sens à ce qui est ou faire taire l’appel humain. Or aucune de ces solutions n’est réalisable.
Une manière de donner du sens serait d’accepter les religions et les dieux. Or ces derniers n’ont pas d’emprise sur l’homme absurde. L’homme absurde se sent innocent, il ne veut faire que ce qu’il comprend et « pour un esprit absurde, la raison est vaine et il n’y a rien au-delà de la raison » (Le mythe de Sisyphe, 1942).
Une autre manière de trouver du sens serait d’en injecter : faire des projets, établir des buts, et par là même croire que la vie puisse se diriger. Mais à nouveau « …tout cela se trouve démenti d’une façon vertigineuse par l’absurdité d’une mort possible ». (Le mythe de Sisyphe, 1942). En effet, pour l’homme absurde il n’y a pas de futur, seul compte l’ici et le maintenant.
La première des deux forces contradictoire, à savoir le silence déraisonnable du monde ne peut donc être niée. Quant à l’autre force contradictoire permettant cette confrontation dont naît l’absurde, qui est l’appel humain, la seule manière de la faire taire serait le suicide. Mais ce dernier est exclu car à sa manière « …le suicide résolut l’absurde » (Le mythe de Sisyphe, 1942). Or l’absurde ne doit pas se résoudre. L’absurde est générateur d’une énergie. Et ce refus du suicide, c’est l’exaltation de la vie, la passion de l’homme absurde. Ce dernier n’abdique pas, il se révolte !
Oui, il faut maintenir l’absurde, ne pas tenter de le résoudre, car l’absurde génère une puissance qui se réalise dans la révolte. La révolte, voici la manière de vivre l’absurde. La révolte c’est connaître notre destin fatal et néanmoins l’affronter, c’est l’intelligence aux prises avec le silence déraisonnable du monde, c’est le condamné à mort qui refuse le suicide. C’est pourquoi Camus écrit : « L’une des seules positions philosophiques cohérentes, c’est ainsi la révolte » (Le mythe de Sisyphe, 1942).
La révolte c’est aussi s’offrir un énorme champ de possibilités d’actions. Car si l’homme absurde se prive d’une vie éternelle, il se libère des contraintes imposées par un improbable futur et y gagne en liberté d’action. Plus le futur se restreint et plus les possibilités d’actions « hic et nunc » sont grandes. Et ainsi l’homme absurde joui d’une liberté profonde. L’homme absurde habite un monde dans lequel il doit accepter que « tout l’être s’emploie à ne rien achever » (Le mythe de Sisyphe, 1942), mais un monde dont il est le maître. Et à Camus, qui fait de Sisyphe le héros absurde, d'écrire : "Il faut imaginer Sisyphe heureux." (Le mythe de Sisyphe, 1942).
Bien que Camus réfute les religions dans lesquelles « …on n’y trouve aucune problématique réelle, toutes les réponses étant données en une fois » (L’homme révolté, 1951), bien que Camus n’accorde aucune importance au futur : « il n’y a pas de lendemain » (Le mythe de Sisyphe, 1942), sa révolte n’en est pas pour autant amorale. « La solidarité des hommes se fonde sur le mouvement de révolte et celui-ci, à son tour, ne trouve de justification que dans cette complicité » (L’homme révolté, 1951). Tout n’est pas permis dans la révolte, la pensée de Camus est humaniste, les hommes se révoltent contre la mort, contre l’injustice et tente de «  se retrouver dans la seule valeur qui puisse les sauver du nihilisme, la longue complicité des hommes aux prises avec leur destin. » (L’homme révolté, 1951). En effet, Camus pose à la révolte de l’homme une condition : sa propre limite. La révolte de Camus n’est pas contre tous et contre tout. Et Camus d’écrire : « La fin justifie les moyens ? Cela est possible. Mais qui justifie la fin ? A cette question, que la pensée historique laisse pendante, la révolte répond : les moyens. » (L’homme révolté, 1951).

Questionnaire sur la vie et l’œuvre  de A.Camus
1. Parlez de son enfance et adolescence dans le quartier de Belcourt. Quelle influence aura cette période de sa vie sur son œuvre ?
2. Quels deux hommes sont déterminants dans la scolarité et la carrière littéraire de Camus ?
3. Comment les premières découvertes littéraires et politiques ont fait évoluer le jeune étudiant Camus ?
4. Parlez du rôle du théâtre dans la vie de Camus.
5. Quelle rôle joue la nature dans la conception du monde de Camus ?
6. Quelle idée du Dieu se fait-il ?
7. Parlez de la carrière journalistique de Camus.
8. Comment réagit-il à la guerre d’Algérie ?
9. Parlez de ses premiers succès littéraires.
10. Pourquoi le style de Camus offre une nouvelle écriture ?
11. Comment interprète-t-il le mythe de Sisyphe ?
12. Parlez de l’absurde de Camus.

Étude de l’œuvre  de A. Camus
1.«La peste»
L'histoire, qui se veut réaliste, aussi bien dans son décor, ses péripéties, la description clinique de la maladie et la variété des personnages, raconte comment la peste se déclare non dans une cité imaginaire, mais à Oran, comment la ville sera coupée du monde et livrée à son malheur, et comment quelques hommes sauront, par leur révolte, opposer au mal la seule attitude possible. La Peste a été le fruit d'une lente maturation : des notes éparses, des lectures, des idées qui germent et, un jour, le romancier sait qu'il tient un sujet et se met au travail. Cela a peut-être commencé par la lecture de la célèbre conférence d'Antonin Artaud Le théâtre et la Peste, prononcée en 1933 à la Sorbonne, publiée en 1934 dans La Nouvelle Revue Française, et qui fera partie du Théâtre et son double.
Pendant les années 1941 et 1942, une grande épidémie de typhus fait des ravages en Algérie et, par un hasard étrange, fournit à l'auteur un modèle bien réel. Les victimes sont nombreuses dans les villages et dans les quartiers musulmans. Des zones entières sont interdites, frappés de quarantaine, comme Oran dans le roman. On estime le nombre des personnes contaminées à 55000 pour 1941 et 200000 pour 1942, avec une mortalité de trente pour cent.
Camus écrit dans ses Carnets, en 1942 : "Je veux exprimer au moyen de la peste l'étouffement dont nous avons souffert et l'atmosphère de menace et d'exil dans laquelle nous avons vécu. Je veux du même coup étendre cette interprétation à la notion d'existence en général."
La peste, c'est-à-dire la terreur de la souffrance et de la mort, l'enfermement, l'exil, même s'il s'agit de "l'exil chez soi", la séparation, tel est le lot des hommes. Ils peuvent s'y abandonner, s'avouer vaincus, y voir la main d'un dieu châtiant on ne sait quel péché, ou bien retrouver leur dignité et leur liberté par la révolte, et la solidarité.
Avec ironie, la conclusion du prière d'insérer, rédigé par l'auteur, montre bien la portée très générale du sujet : "Histoire fort simple, comme on le voit, et, d'une certaine manière, assez commune."
Le mot "exil" revient également dans le prière d'insérer. L'un des premiers titres auxquels Camus songeait est Les Exilés. On a vu que le titre qu'il a donné à l'extrait publié dans Domaine français est Les Exilés dans la peste. Dans le roman tout entier, il insiste sur l'idée de séparation. C'est une des épreuves qu'il semble avoir ressenti le plus fortement pendant la guerre. "Ce qui me semble caractériser le mieux cette époque, c'est la séparation", lit-on dans un carnet rouge où il prend des notes pour La Peste. Et encore : "Tous sont renvoyés à leur solitude. Si bien que la séparation devient générale... Faire ainsi du thème de la séparation le grand thème du roman."
Au début de 1943, une première version est à peu près terminée. Mais la maturation va durer encore des années. Les personnages évoluent. Il y en a même un qui disparaît : Stephan, et cède la place à d'autres : Grand et Rambert. La construction se modifie, prend de l'ampleur, le style trouve cette justesse qui fait deviner l'honnêteté, la pudeur, la haine de toute grandiloquence du narrateur, bien avant que l'on sache qu'il n'est autre que le docteur Rieux. De la conception à la version finale, La Peste a occupé l'écrivain pendant sept ans. Les manuscrits de La Peste, offerts par les enfants d'Albert Camus à la Bibliothèque nationale, témoignent de ce travail considérable.
Le roman commence sur un ton calme, par un discours modeste, à la respiration tranquille. C'est souvent la marque des grandes œuvres. Elles prennent leur temps : "Les curieux événements qui font le sujet de cette chronique se sont produits en 194*, à Oran. De l'avis général, ils n'y étaient pas à leur place, sortant un peu de l'ordinaire. A la première vue, Oran est, en effet, une ville ordinaire et rien de plus qu'une préfecture française de la côte algérienne."
Au moment de passer en revue ces personnages, une évidence saute aux yeux. Les femmes sont absentes de La Peste. Ou, si l'on préfère parler plus élégamment, disons qu'elles y sont peintes "en abîme". La femme de Rieux part au début et meurt. Celle qu'aime Rambert ne se définit que par la séparation. Quant à celle de Grand, il y a longtemps qu'elle l'a quitté et, du fond des années lointaines, elle lui arrache encore des larmes. Seule présente, la mère de Rieux ne parle pas. On voit sur son visage "tout ce qu'une vie laborieuse y avait mis de mutisme"... "Ainsi, sa mère et lui s'aimeraient toujours dans le silence. Et elle mourrait à son tour - ou lui - sans que, pendant toute leur vie, ils pussent aller plus loin dans l'aveu de leur tendresse". Pourquoi cette absence de femmes ? Camus l'a voulue, qui note dans ses Carnets, en soulignant la phrase : "En pratique : il n'y a que des hommes seuls dans le roman."
Alors qu'il se trouve aux États-Unis, en 1946, il arrête de noter ses impressions de voyage pour écrire : "Peste : c'est un monde sans femmes et donc irrespirable."
Il n'oublie jamais que le thème principal du roman est la séparation. Les femmes n'ont pas leur place dans une ville qui ressemble à une forteresse assiégée. Mais, à travers leur absence, l'amour est évoqué davantage que dans la plupart des œuvres de Camus. Le roman montre combien des lettres, les télégrammes, la mémoire même sont impuissants à lutter contre la séparation. Lorsque Rieux surprend Grand en larmes, il "savait ce que pensait à cette minute le vieil homme qui pleurait, et il le pensait comme lui, que ce monde sans amour était comme un monde mort et qu'il vient toujours une heure où on se lasse des prisons, du travail et du courage pour réclamer le visage d'un être et le cœur émerveillé de la tendresse".
En face de Rieux, il arrive à Tarrou de constater avec lassitude que le mal est trop universel, qu'il gîte même en nous. Chacun porte la peste. Personne n'en est indemne. "... il faut se surveiller sans arrêt pour ne pas être amené, dans une minute de distraction, à respirer dans la figure d'un autre et à lui coller l'infection. Ce qui est naturel, c'est le microbe. Le reste, la santé, l'intégrité, la pureté, si vous voulez, c'est un effet de la volonté et d'une volonté qui ne doit jamais s'arrêter. L'honnête homme, c'est celui qui n'infecte presque personne, c'est celui qui a le moins de distraction possible. Et il en faut de la volonté et de la tension pour ne jamais être distrait ! Oui, Rieux, c'est bien fatigant d'être un pestiféré. Mais c'est encore plus fatigant de ne pas vouloir l'être. C'est pour cela que tout le monde se montre fatigué, puisque tout le monde, aujourd'hui, se trouve un peu pestiféré. Mais c'est pour cela que quelques-uns, qui veulent cesser de l'être, connaissent une extrémité de fatigue dont rien ne les délivrera plus que la mort."
Si la leçon de La Peste reste la révolte, il arrive ainsi que l'on frôle l'abîme. L'auteur a sans doute partagé ces moments de désespoir d'un personnage auquel il s'est particulièrement attaché. C'est ainsi que l'on passe de La Peste aux amères de La Chute.

Analyse de l’extrait 1.
 «Le prêche de Panelouх eut lieu ...» 
Le prêche de Paneloux eut lieu dans une église qui n'était pleine qu'aux trois quarts. Le soir du prêche, lorsque Rieux arriva, le vent, qui s'infiltrait en filets d'air par les portes battantes de l'entrée, circulait librement parmi les auditeurs. Et c'est dans une église froide et silencieuse, au milieu d'une assistance exclusivement composée d'hommes, qu'il prit place et qu'il vit le Père monter en chaire. Ce dernier parla d'un ton plus doux et plus réfléchi que la première fois et, à plusieurs reprises, les assistants remarquèrent une certaine hésita. lion dans son débit. Chose curieuse encore, il ne disait plus « vous », mais « nous ».
Cependant, sa voix s'affermit peu à peu. Il commença par rappeler que, depuis de longs mois, la peste était parmi nous et que maintenant nous la connaissions mieux pour l'avoir vue tant de fois s'asseoir à notre table, au chevet de ceux que nous aimions, marcher près de nous et attendre notre venue aux lieux de travail, maintenant donc, nous pourrions peut-être mieux recevoir ce qu'elle nous disait sans relâche et que, dans la première surprise, il était possible que nous n'eussions pas bien écouté. Ce que le Père Paneloux avait déjà prêché au même endroit restait vrai – ou du moins c'était sa conviction. Mais, peut-être encore, comme il nous arrivait à tous, et il s'en frappait la poitrine, l'avait-il pensé et dit sans charité. Ce qui restait vrai, cependant, était qu'en toute chose, toujours, il y avait à retenir. L'épreuve la plus cruelle était encore bénéfice pour le chrétien. Et, justement, ce que le chrétien, en l'espèce, devait chercher, c'était son bénéfice, el de quoi le bénéfice était fait, et comment on pouvait le trouver.
A ce moment, autour de Rieux, les gens parurent se carrer entre les accoudoirs de leur banc et s'installer aussi confortablement qu'ils le pouvaient. Une des portes capitonnées de l'entrée battit doucement. Quelqu'un se dérangea pour la maintenir. Et Rieux, distrait par cette agitation, entendit à peine Paneloux qui reprenait son prêche. Il disait à peu près qu'il ne fallait pas essayer de s'expliquer le spectacle de la peste, mais tenter d'apprendre ce qu'on pouvait en apprendre. Rieux comprit confusément que, selon le Père, il n'y avait rien à expliquer. Son intérêt se fixa quand Paneloux dit fortement qu'il y avait des choses qu'on pouvait expliquer au regard de Dieu et d'autres qu'on ne pouvait pas. Il y avait certes le bien et le mal, et, généralement, on s'expliquait aisément ce qui les séparait. Mais à l'intérieur du mal, la difficulté nécessaire et le mal apparemment inutile. Il y avait don Juan plongé aux Enfers et la mort d'un enfant. Car s'il est juste que le libertin soit foudroyé, on ne comprend pas la souffrance de l'enfant. Et, en vérité, il n'y avait rien sur la terre de plus important que la souffrance d'un enfant et l'horreur que cette souffrance traîne avec elle et les raisons qu'il faut lui trouver. Dans le reste de la vie, Dieu nous facilitait tout et jusque-là, la religion était sans mérites. Nous étions ainsi si sous les murailles de la peste et c'est à leur ombre mortelle qu'il nous fallait trouver notre bénéfice. Le Père Paneloux refusait même de se donner des avantages faciles qui lui permissent d'escalader le mur. Il lui aurait été aisé de dire que l'éternité des délices qui attendaient l'enfant pouvait compenser sa souffrance, mais, en vérité, il n'en savait rien. Qui pouvait affirmer en effet que l'éternité d'une joie pouvait compenser un instant de la douleur humaine? Ce ne serait pas un chrétien, assurément, dont le Maître a connu la douleur dans ses membres et dans son âme. Non, le Père resterait au pied du mur, fidèle à cet écartèlement dont la croix est le symbole, face à face avec la souffrance d'un enfant. Et il dirait sans crainte à ceux qui l'écoutaient ce jour-là: «Mes frères, l'instant est venu. Il faut tout croire ou tout nier. Et qui donc, parmi vous, oserait tout nier ?»
(tiré du roman « La Peste »)
Exercices de lexique

1. Vocabulaire.    Remplissez la grille avec les mots du texte :
  • le sermon
  • le débit
  • sans relâche
  • la conviction
  • la charité
  • se carrer
  • foudroyer
  • en l’espèce
  • le bénéfice

2. Trouvez dans le texte les équivalents français des phrases et expressions
suivantes :
  • Коли вечором Рійо увійшов до собору, вітер із свистом просочувався між створами вхідних дверей, вільно походжав серед присутніх.
  • Панотець заговорив більш лагідним та поміркованим тоном ніж першого разу, й паства помітила в його мові певну нерішучість.
  • Те, про що промовляв панотець Панлю з тієї самої кафедри, лишається правдою, або ж принаймні таким було його переконання.
  • У цю хвилину, люди, що сиділи навколо Рійо, обіперлися об підлокітники лавок та вмостилися настільки зручно, наскільки це було можливо.
  • Якщо справедливим є те, що розпутника уражено, то страждання дитини незрозуміле.
  • Таким чином, ми опинилися під мурами чуми, й саме в їх вбивчій тіні нам слід шукати благодаті.
  • Панотець Панлю зостанеться біля підніжжя стіни, вірний четвертуванню, символом якого є хрест, обличчям до муки дитини.

Étude du texte
Lecture méthodique
1. Séparez dans cet extrait le récit et le discours. Quels sont les indices qui font la différence entre ces deux types de texte ?
2. Comment est décrite l’ambiance dans l’église ? Quel est son rôle symbolique ?
3. Analysez d’autres symboles du texte.

Pour le commentaire
1. Expliquez le mouvement du prêche de Panelouх. Quelle en est l’idée principale ? Comment est-il vu par le narrateur ?
2. Quel rôle jouent les exemples ? Interprétez-les.
3. Comment est perçue la peste dans cet extrait ?

2. Essais « Noces » : art de la description
Le titre : Composé uniquement d'un substantif au pluriel, le titre révèle le parti pris d'aller à l'essentiel. Euphorique, il décrit un accord entre le sujet humain et la nature et suggère l'idée d'un instant privilégié qui invite à l'exaltation et à la célébration.
La structure : Le recueil est composé de quatre récits lyriques :
- Noces à Tipasa : Camus visite au printemps Tipasa, un petit port situé sur le littoral à l'est d'Alger, où des fouilles ont permis de découvrir des ruines datant de l'occupation romaine. Dans cette ode à un lieu symbolique, Camus célèbre les noces de l'homme avec le monde.
- Le vent à Djémila : l'essai décrit une ville morte traversée par le vent. Contredisant la formule de Maurice Barrès ("Il est des lieux où souffle l'esprit"), Camus évoque un lieu "où meurt l'esprit pour que naisse une vérité qui est sa négation même." La ville romaine inspire une méditation sur la mort ainsi que sur la nécessité de "créer des morts conscientes".
- L'Été à Alger : la description d'Alger et de la vie des Algérois s'accompagne d'un éloge du bonheur simple qui consiste à vivre dans le présent.
- Le Désert : Évoquant les paysages de la Toscane, l'essai associe le thème du bonheur ("le simple accord entre un être et l'existence qu'il mène") et celui de la conscience lucide chez l'homme, "la double conscience de son désir de durée et son destin de mort".
La communion sensible et sensuelle avec le monde
Noces à Tipasa s'ouvre sur la vision panthéiste d'un paysage méditerranéen, lieu de confluence entre l'Histoire, la nature et le mythe. Dans ce lieu magique, les vestiges de la civilisation disparue s'harmonisent avec la beauté de la nature.
A la fécondité de la nature qui se caractérise par sa profusion et son éclat correspond la richesse des sensations et des impressions qui conduisent à une extase satisfaisant tous les désirs de l'âme et du corps. Cette intensité heureuse du vécu se traduit par l'abondance des pluriels et surtout des métaphores lyriques appartenant au champ sémantique du désir amoureux. L'ivresse sensuelle, la fête païenne du corps où l'être s'accomplit complètement en libérant et célébrant la vie physique, sont sous-entendues par la quête du sens et de l'unité. Médiateur, le corps ouvre en effet sur une expérience initiatique et spirituelle, sur "des illuminations plus hautes" qui révèlent l'être à lui-même. Cette expérience du monde au cours de laquelle l'être se rapproche de la nature dans une communication directe, immédiate, cosmique, prend une dimension presque mystique.

Le refus de la transcendance
La quête d'un accord avec le monde qu'il faut retrouver en soi, la recherche d'un art de vivre au présent et de jouir du monde qui s'offre, s'accompagnent d'une lucidité face à "la certitude consciente d'une mort sans espoir" et à la vérité tragique de la condition humaine. "A cette heure tout mon royaume est de ce monde", affirme Camus. Ce royaume se situe dans l'ici-bas terrestre, dans les paysages méditerranéens qui font entendre "un chant d'amour sans espoir". Les dieux de l'écrivain sont les éléments naturels, la terre, le ciel, la mer, le vent, la lumière solaire. Le divin appartient à la réalité concrète, imminente qui se donne dans sa profusion dionysiaque. Le refus de laisser échapper le présent exige le renoncement à tout pari sur un au-delà, à tout espoir en un avenir.
Le bonheur consiste à s'insérer dans la durée du monde, à accepter avec simplicité la transparence, l'instantanéité des choses sans chercher à leur attribuer un sens, à se retrouver soi-même dans ce monde fugace, insaisissable, étranger à l'homme et inhumain. Seuls l'émerveillement devant le monde et la jouissance d'instants privilégiés permettent de dépasser la souffrance, la pauvreté ou l'injustice en offrant des vérités "relatives" et non "idéales". La "patrie de l'âme" à laquelle aspire Camus ne se situe pas dans un arrière-monde ou un au-delà métaphysique mais dans la réalité physique et mystérieuse, une réalité qui révèle l'unité et la permanence de l'être. Ce refus de la transcendance est inséparable du sens du sacré devant l'énigme et la profondeur du monde.

L'homme et la mer
Pour l'écrivain, la mer, et en particulier la mer méditerranéenne, représente non seulement l'espace d'un ressourcement physique mais aussi la chance d'une ouverture à l'autre à travers l'amitié ou l'amour ainsi que la possibilité d'une communion avec la nature et le monde. Lieu des origines comme la mère, elle symbolise l'innocence de l'être humain, libéré des contraintes sociales, morales et religieuses et le bonheur du royaume retrouvé.

Analyse de l’extrait 2. 
«Arrivée à Tipasa »

Au printemps, Tipasa est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l'odeur des absinthes, la mer cuirassée d'argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs et la lumière à gros bouillons dans les amas de pierres. À certaines heures, la campagne est noire de soleil. Les yeux tentent vainement de saisir autre chose que des gouttes de lumière et de couleurs qui tremblent au bord des cils. L'odeur volumineuse des plantes aromatiques racle la gorge et suffoque dans la chaleur énorme. À peine, au fond du paysage, puis-je voir la masse noire du Chenoua qui prend racine dans les collines autour du village et s'ébranle d'un rythme sûr et pesant pour aller s'accroupir dans la mer.
Nous arrivons par le village qui s'ouvre déjà sur la baie. Nous entrons dans un monde jaune et bleu où nous accueille le soupir odorant et âcre de la terre d'été en Algérie. Partout des bougainvillées rosat dépassent les murs des villas; dans les jardins, des hibiscus au rouge encore pâle, une profusion de roses thé épaisses comme de la crème.et de délicates bordures de longs iris bleus. Toutes les pierres sont chaudes...
À gauche du port, un escalier de pierres sèches mène aux ruines, parmi les lentisques et les genêts. Le chemin passe devant un petit phare pour plonger ensuite en pleine campagne. Déjà au pied de ce phare, de grosses plantes grasses aux fleurs violettes, jaunes et rouges, descendent vers les premiers rochers que la mer suce avec un bruit de baisers. Debout dans le vent léger, sous le soleil qui nous chauffe un seul côté du visage, nous regardons la lumière descendre du ciel, la mer sans une ride, et le sourire de ses dents éclatantes. Avant d'entrer dans le royaume des ruines, pour la dernière fois, nous sommes spectateurs.
(tiré du recueil NOCES)

Exercices de lexique
1. Vocabulaire.    Remplissez la grille avec les mots du texte :
  • s’ébranler
  • s’accroupir
  • la baie
  • le soupir
  • âcre
  • la profusion
2. Trouvez dans le texte les équivalents français des phrases et expressions suivantes :
  • Запах полину
  • Купа каміння
  • Дере в горлі
  • Нестерпна спекота
  • Навколішки увійти в море
  • Духмяний і їдкий подих розпеченої землі
  • Розмай цвіту чайної троянди
  • Ніжна облямівка довгих голубуватих ірисів
  • Відблиски його білозубої усмішки
  • Проміння, що струменіє з неба

Étude du texte
Lecture méthodique
1. Quel rôle joue la forme passive dans la première phrase ?
2. Quel est le mouvement du texte ?
3. Énumérez les sensations de la perception de cette description.
4. Repérez le champ lexical de la lumière. Expliquez son effet. Quelles sont les couleurs de ce texte ?
5. Quelles figures de style et tropes prédominent ? Pourquoi ?

Pour le commentaire
1. Que signifie le lieu évoqué dans le texte pour l’auteur ?
2. Quelles impressions se dégagent de cette description ?
3. Quelle idée persiste dans cet extrait ?

Bilan
1. Signification générale de l’œuvre
Tour à tour essayiste, romancier et auteur dramatique comme J.-P. Sartre, Camus se consacrera de plus en plus à sa carrière d'écrivain. Son œuvre pourrait, en gros, s'ordonner autour de deux pôles : l'absurde et la révolte, correspondant aux deux étapes de son itinéraire philosophique.
LA MORALE DE L' ABSURDE
La prise de conscience du non-sens de la vie le conduit à l'idée que l'homme est libre de vivre "sans appel", quitte à payer les conséquences de ses erreurs, et doit épuiser les joies de cette terre. Ces idées, exposées dans Le Mythe de Sisyphe (1942), sont illustrées par le roman de L' Étranger (1942) et, en 1944, par deux pièces de théâtre : Caligula et Le Malentendu.
L' HUMANISME DE LA RÉVOLTE
L'auteur aboutit à la découverte d'une valeur qui donne à l'action son sens et ses limites : la nature humaine. Cet humanisme apparaît dans La Peste (1947) et dans deux pièces de théâtre, L' État de siège (1948) et Les Justes (1950), avant de s'exprimer vigoureusement dans L' Homme Révolté (1951).
La carrière de Camus est donc celle d'un psychologue et d'un moraliste. Dans son exigence de probité, avec une réserve et une sobriété toutes classiques, il accorde la première place aux idées et refuse de sacrifier à la magie du style. Pourtant ce serait une erreur de méconnaître la variété et l'exacte appropriation de son art d'écrivain. Sans doute a-t-il su nous imposer dans L' Étranger et La Peste ce style neutre, impersonnel, tout en notations sèches et monotones, qui est devenu inséparable du climat de l'absurde; mais on découvre aisément dans son œuvre des résurgences de l'aptitude poétique à traduire les sensations dans leur pleine saveur qui triomphait dans Noces (1938), un des premiers essais où, avant l'amère découverte de l'absurde, le jeune Camus célébrait avec fougue ses "noces avec le monde". Et l'on sera sensible à l'ironie et à l'humour qui jettent çà et là de discrètes lueurs, avant de briller de tout leur éclat dans La Chute (1956), œuvre étrange et séduisante dont la verve et le rythme capricieux font songer à la "satire" du Neveu de Rameau.
2. Lyrisme de Camus
Le lyrisme ne caractérise pas seulement les œuvres de jeunesse de Camus comme Noces, mais l'œuvre tout entière, même s'il est tenu à distance dans L'Étranger avec son style neutre ou dans La Peste avec son souci de l'objectivité. Comme le notent Jacqueline Lévi-Valensi et Agnès Spiquel, "Le premier Homme dans son inachèvement même, témoigne de la présence continue et féconde, même si elle s'est voulue parfois contenue et secrète, d'un lyrisme du cœur et de l'esprit, reconnu comme mode de compréhension et d'expression de l'histoire d'un homme et de toute une communauté ; et, par là, conduit à relire autrement l'ensemble de l'œuvre." Prenant ses sources dans l'absence du père et le silence de la mère, s'exprimant à travers les thèmes de la lumière, de la musique et de l'eau mais aussi à travers la référence constante aux sensations corporelles, le chant secret de l'écrivain est plus qu'un mode d'expression : il renvoie à une méthode de pensée et un art de vivre et révèle une conception de l'écriture entre silence et chant. La relecture de l'œuvre de Camus fait apparaître une évolution du lyrisme. Alors que les premiers essais célèbrent la fusion cosmique avec la nature et l'accord lyrique au monde, Le Premier Homme est empreint d'un lyrisme plus humain qui valorise l'écoute de l'autre, le don et le partage.

Chez Camus, le chant lyrique n'est pas incompatible avec les exigences de la morale et la recherche de rigueur. D'un côté, l'œuvre semble tentée par la poésie, par le chant personnel lyrique exaltant la Beauté, comme l'a montré le poète Philippe Jaccottet : "Un homme qui a senti cela, l'énigme de la lumière, ce que nous dit ou semble nous dire le monde, l'encourageante, la merveilleuse leçon des choses ou des moments, un homme qui éprouve cela profondément, comme il semble que ce soit le cas pour Camus, ne peut qu'être tenté, même inconsciemment par la poésie, dont l'affaire semble ne pas être autre chose que de laisser passer, ou de faire passer, cette voix du monde jusqu'à nous." ("Le dernier livre de Camus", dans Écrits pour papier journal, chroniques 1951-1970, Gallimard, 1994, p.68) Mais de l'autre côté, le refus catégorique de toute transcendance, l'engagement lucide dans l'actualité et la lutte ont entravé l'épanouissement de ce chant. La relation problématique qu'entretient l'écrivain avec le lyrisme et le langage se traduit par la tension entre la recherche de clarté et de lucidité et le désir de dire la beauté du monde, entre l'effusion lyrique et la distance ironique.

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